L’animal et l’arrivée d’un enfant

Beaucoup de foyers français ont un animal familier. Pour les enfants, la présence d’un chien, d’un chat, est une source d’enrichissement affectif qui n’est plus à démontrer. Et tout comme l’arrivée de l’enfant se prépare, une attention différente mais nécessaire doit être portée à l’animal, afin qu’il ne soit pas perturbé.

L’ARRIVÉE D’UN ENFANT DANS UN FOYER QUI POSSÈDE UN CHIEN OU UN CHAT IMPLIQUE DES CHANGEMENTS DE VIE QUI PEUVENT INFLUER SUR  LE  COMPORTEMENT  DE   L’ANIMAL.   DANS LA TRÈS GRANDE MAJORITÉ DES CAS, LE CHIEN OU LE CHAT S’ADAPTE TOUT NATURELLEMENT À CE NOUVEL ENVIRONNEMENT. QUELQUES RÈGLES ÉLÉMENTAIRES EN MATIÈRE D’HYGIÈNEET DE SURVEILLANCE DOIVENT ÊTRE OBSERVÉES PAR LES MAÎTRES POUR QU’UNE COMPLI­CITÉ S’INSTALLE AU SEIN DE LA « NOUVELLE » FAMILLE. MAIS   LA   PRÉPARATION   DE   L’ARRIVÉE   D’UN   ENFANT   SUSCITE SOUVENT DES QUESTIONS DE LA PART DES PARENTS POSSESSEURS D’UN ANIMAL.

Comment avertir un animal de l’arrivée d’un bébé ?

Lorsqu’une femme attend un enfant, elle émet des phéromones que nous percevons sans nous en rendre compte. Ces phéromones sont perçues par les animaux et il est certain qu’un chien est souvent au courant de la grossesse, avant même que les tests ne soient pratiqués !

Cela dit, la grossesse entraîne souvent des modifications dans la vie de l’animal avant même l’arrivée du bébé. La future maman reste à la maison, les promenades sont plus rares mais les câlins plus fréquents. Ces premiers changements peuvent dérouter l’animal. Les propriétaires doivent tout de suite penser à ne pas trop changer les habitudes, sans toutefois culpabiliser : le chien était le premier «enfant» du couple et bénéficiait de toute leur attention ? Être naturel, ne pas en faire trop pour se faire «pardonner» – tout en (re)donnant au chien une place claire au sein du foyer – est encore la meilleure attitude à avoir !

Et si les enfants sont plus grands ?

Des enfants plus grands peuvent arriver dans un foyer où vivent des chiens et des chats, lors d’adoption ou dans le cas d’une famille « recomposée ». Il s’agit tout d’abord de bien savoir si les animaux sont socialisés aux enfants. Il est aussi nécessaire de savoir quelle est l’attitude des enfants vis-à-vis des animaux : ont-ils déjà vécu à leur contact ? Des enfants habitués aux chiens peuvent manquer de prudence; des enfants qui ont peur des chiens peuvent mal communiquer avec eux. Un questionnement préalable des enfants est alors nécessaire. L’âge des enfants est également impor­tant car il va influer sur la communica­tion. Les premiers .contacts doivent être positifs, lors de jeux, de promenades avec l’animal.

Les animaux peuvent-ils être jaloux des enfants ?

La jalousie est un sentiment purement humain qui est très complexe. Les chiens ou les chats ne peuvent éprouver de jalousie; en revanche, ils peuvent éprouver de l’envie. Oui, un chien peut avoir envie de monter sur les genoux de la maman qui allaite son bébé, surtout quand il y était habitué ! Il suffit de le repousser doucement et de l’envoyer dans son panier. Il apprendra à attendre que sa maîtresse soit disponible. Les parents, tout en voyant d’un
mauvais oeil la «jalousie du chien», .cherchent néanmoins à se faire pardonner et sont très ambigus dans leur relation avec leur animal, ce qui est très déroutant pour lui.

Les animaux peuvent-ils se venger ?

Lorsqu’un enfant arrive, le chat de la maison peut se mettre à faire du marquage urinaire, notamment sur les affaires du bébé. Les’ propriétaires pensent alors qu’il manifeste sa jalousie et qu’il se venge ! Il n’en est rien ! Le chat « marque » en réaction à une perturbation de son environnement, engendrée par l’arrivée du bébé. Ces manifestations disparaissent d’elles-mêmes si le chat n’est pas sanctionné et que les maîtres gardent de bonnes relations avec lui : il ne faut donc pas le gronder.

Les chats peuvent-ils représenter un danger pour le bébé ?

De nombreuses idées reçues circulent sur les chats et les bébés : «Les chats se couchent sur la tête des bébés dans les berceaux et les étouffent, jouent avec les yeux, etc.»… Rien de tout cela n’est vrai ! Un chat normal peut parfois avoir envie de jouer avec un petit pied qui bouge : une simple surveillance permet d’éviter tout incident. Lorsque l’enfant dort, la porte de la chambre doit être fermée : il est probable que le chat aimera aller se blottir dans la chaleur du berceau, ce qui n’est pas à conseiller pour de simples raisons d’hygiène. Néanmoins, les chats réputés agressifs avant l’arrivée de l’enfant doivent impé­rativement être évalués par un vétéri­naire car ils peuvent représenter un danger réel.

Quels sont les risques pour les enfants avec les animaux ?

En dehors d’éventuels problèmes d’aller­gies, les risques hygiéniques sont très faibles et des mesures simples suffisent :
–          Maintenir le chien propre en le lavant régulièrement.
–           Se laver les mains après les caresses et les jeux.
–          Maintenir propre la litière des chats.
–          Vermifuger l’animal régulièrement, au moins deux fois par an.
–          Signaler au médecin la présence d’ani­maux en cas de problème dermatolo­gique ou respiratoire chez un enfant.
En revanche, les risques de morsures existent. Ceux-ci varient, entre autres, avec l’âge des enfants :
–          Avant que l’enfant ne se déplace, il y a peu de risques. Des cas de prédation sur des bébés ont été relatés. Ils sont raris­simes mais dramatiques. Il est donc indispensable de signaler à votre vétéri­naire toute attitude indiquant qu’un chien voit un enfant comme une « proie ».
De 6 à 18 mois, l’enfant se déplace à 4 pattes, roule en trotteur, puis marche. Il est difficilement contrôlable par ses parents car il n’est pas encore sensible aux interdits. Il a accès aux zones de repos et de retrait des animaux qui peuvent facilement se sentir agressés et mordre en réaction. Il est donc impé­ratif de surveiller les enfants ou de rendre inaccessibles les zones de repos des chiens.
De 18 mois à trois ans : l’enfant recherche activement le contact avec les animaux, sans percevoir les signaux de menace qui préviennent une agression : grognements, babines retroussées; feulements, crachements chez les chats. Par précaution, un enfant ne doit donc jamais rester seul avec un animal.
Après trois ans, le risque diminue car l’enfant comprend et obéit mieux à ses parents. Mais là encore, un enfant ne doit jamais rester seul avec un animal.
–          En cas de morsure de chien ou de chat, des visites sanitaires chez le vétérinaire sont obligatoires (3 visites à une semaine d’intervalle pouvant être ensuite prise en charge par l’assurance responsabilité civile du maître ou de la personne qui a l’animal en garde).

Y’a-t-il des races de chiens gentilles avec les enfants ?

Contrairement aux idées reçues, il n’existe pas de races plus gentilles que d’autres avec les enfants. Une socialisa­tion précoce aux enfants (élevage en famille), des contacts fréquents avec eux avant l’arrivée d’un bébé au foyer, un cadre hiérarchique clair donné par -les adultes sont des facteurs favorisant une bonne acceptation de l’enfant, quelle que soit la race du chien. Il est incontestable, cependant, que la taille et la puissance du chien jouent un rôle dans la dangerosité.
Les chiens peuvent-ils défendre les bébés ?
Le chien est un animal social; lorsqu’il arrive, l’enfant – identifié grâce à ses odeurs – devient tout de suite un membre du groupe. Le chien peut alors défendre le bébé contre les étran­gers, surtout s’il se sent investi de cette mission par les parents ou a un statut hiérarchique de « dominant » dans la famille.
Les étrangers au groupe doivent être prudents et ne pas s’approcher du berceau si le chien est menaçant : il n’hé­sitera pas à mordre si l’on s’approche. Les parents ne doivent pas favoriser ces comportements et envoyer le chien à sa place.

Quelles mesures préventives prendre ?

Avant l’arrivée du ou des enfants, il importe que les animaux ne présentent aucun signe agressif. Toute agressivité justifie, chez le chien comme chez le chat, une prise en charge par un vétéri­naire qui juge de l’opportunité de mettre en place un traitement, ou non. Le temps de la grossesse est souvent suffisant pour traiter l’animal et donner à tous de bonnes habitudes.
Tout doit bien se passer si le chien est à la bonne place hiérarchique et s’il ne fait pas la loi à la maison. Consulter un vétérinaire avant l’arrivée de l’enfant reste la meilleure solution pour prévenir les risques.

La consultation comportementale prénatale

Cette visite consiste en un examen clinique et un examen comportemental de l’animal.

Pour le chien.

Lors de l’examen clinique, le vétéri­naire évalue :
le gabarit du chien qui est important à prendre en compte dans l’évaluation de la dangerosité potentielle.
les signes de douleur : un chien qui a de l’arthrose ou mal aux oreilles est plus facilement irritable et supporte moins bien la présence de l’enfant.
la surdité ou la cécité : un chien deve­nant sourd ou aveugle risque plus d’être surpris, d’avoir peur ou de mordre.

Lors de l’examen comportemental, le vétérinaire manipule le chien, le caresse, l’observe. Il remarque si le chien est craintif, hyperactif, ou s’il est très sûr de lui. Il évalue ensuite :
la socialisation aux enfants ou aux nourrissons : a-t-il été déjà en contact avec eux ? Recherche-t-il leur compagnie ? Présente-t-il de la peur quand il en rencontre ?
son équilibre émotionnel : Présente-t-il des peurs fréquentes ? Est-il inquiet au moindre changement ? Lui arrive-t-il de grogner, de mordre quand il rencontre des étrangers ?
son statut hiérarchique : arrive-t-il au chien de grogner ou de mordre si on le déplace, le manipule ? Quels sont ses lieux de couchage, son mode d’alimentation ? Demande-t-il beau­coup d’attention ?
 
Toutes ces données permettent au vétérinaire d’avoir une bonne idée de la tolérance à venir du chien par rapport à un enfant.
 
À l’issue de la consultation, il est à même de donner de simples conseils si le chien est normal, de prescrire un trai­tement comportemental permettant de réduire les risques, ou de prendre des mesures de protection pour l’enfant à venir si le chien lui semble dangereux.

Pour le chat.

Le vétérinaire évalue la capacité à s’adapter du chat, le contrôle de ses griffes et de sa morsure, la présence d’agression, notamment de prédation.
 
 La visite prénatale est nécessaire au moindre doute en cas de chat agressif ou craintif.

Conduite à tenir à l’arrivée d’un enfant

Pour le chien

L’arrivée d’un enfant ne doit pas être une source de problèmes quand un chien est correctement intégré et socialisé. Certaines précautions sont cependant nécessaires :
 
Certains auteurs recommandent de rapporter à la maison le linge porté par le nourrisson. Si le chien présente des manifestations d’inquiétude, on ne prête pas attention à celles-ci, de façon à obtenir une habituation. Si l’inquiétude persiste, la vigilance est de rigueur. Il est inutile de déballer les langes ou les couches – le chien n’en a pas besoin pour capter les odeurs – ni de présenter l’en­fant au chien : ceci ne revêt aucune signi­fication en langage canin, même si cela rassure certains parents.
 
Dans la mesure du possible, le rythme de vie du chien doit être globalement respecté, tel qu’il était avant l’arrivée de l’enfant. Il est parfois difficile de respecter cette règle, mais si les proprié­taires sortent le chien régulièrement, lui consacrent un temps de qualité, même plus court (jeux, caresses, promenades avec le bébé), le chien s’adapte très vite à ces nouvelles règles de vie.
 
Culpabiliser, tenter de donner autant au chien qu’à l’enfant ne peut que le dérouter.
 
 Pour l’arrivée de plus grands enfants, les précautions doivent tenir compte de l’âge. Un enfant ne doit jamais déranger un chien qui dort ou se repose dans son panier, ni toucher sa gamelle ou le caresser quand il mange.

Pour le chat.

À l’arrivée de l’enfant, le chat sait rester sur ses gardes, puis explorer progressive­ment ce qui vient perturber son territoire et ses habitudes. Il est important de lui ménager des lieux de repos où il peut être tranquille, de lui permettre de se cacher et d’avoir de temps en temps accès aux genoux de ses maîtres : comme au bon vieux temps !

CONCLUSION

Le chien ou le chat est un animal social et lorsqu’un enfant arrive dans une foyer, il se familiarise très vite à ce nouvel environnement. S’en suivent alors moments de bonheur autour de jeux, de caresses et de promenades. Mais dans des cas rarissimes, cette situation peut poser un problème réel si le chien, en particulier, présente des signes forts d’agressivité ou considère un bébé comme une « proie ».
 
Il est donc impératif de consulter votre traitant si vous avez un doute sur le comportement de votre animal car si ce dernier n’est pas socialisé à l’enfant, il peut devenir dangereux.
 
 
Texte : Dr Vét Catherine Mège, Vétérinaire comportementaliste diplômée des ENVF